Escarcoke

Publié le par coline

IMG.jpgUn chaud après-midi de fin juillet, dans un heureux coin de campagne situé aux alentours de Chaillé-sous-les-Ormeaux, près de la Roche-sur-Yon, un paisible pêcheur découvre le corps d’une jeune fille violée et assassinée – Mélanie, quinze ans à peine – serrant dans son poing une coquille vide d’escargot. Ce sont deux gendarmes qui sont chargés de l’enquête, le maréchal-des-logis Gérard Duchassin, « la petite cinquantaine moustachue et avenante », flanqué du lieutenant Anna Cadou, une jeunette bien malicieuse qui n’a pas froid aux yeux – ni au derrière –, toujours « le préfixe à la redresse ». S’ensuivent les interrogatoires des uns et des autres, les voisins et connaissances, notamment d’Alfred Bernardeau, le maire du village, qui tient ses réunions au Café des sports où il tape le carton tout en éclusant des ballons de rosé, Émile, un taciturne amateur de lumas (nom donné à l’escargot du cru), et bien sûr les parents effondrés de la victime, les Galerneau, qui ne comprennent pas, leur fille ayant été tout ce qu’il y a de « comme il faut ». Puis les résultats de l’autopsie arrivent, les empreintes génétiques du violeur/tueur ont été relevées, et l’on apprend également que des traces de cocaïne se trouvaient dans la coquille de l’escargot. Alors, la petite Mélanie était-elle droguée, dealeuse, est-ce cette coke la cause de son malheur ? C’est alors que certains souvenirs remontent jusqu’au képi de notre gendarme… Cette enquête, menée toute en souplesse et décontraction le long de cette novella, est en fait un prétexte, avec ses phrases frisant parfois le bucolique, troussées comme de savoureuses recettes culinaires, pour nous entraîner dans une ballade poétique noire où le sens l’emporte sur l’action – car, ne nous méprenons pas, Louis Dubost est avant tout un poète. Ayant créé et dirigé durant de nombreuses dizaines d’années les éditions Le Dé bleu, nous ne verrons hélas plus sa silhouette bonhomme derrière son étal de livres au Marché de la poésie notamment, place Saint-Sulpice, ses yeux rieurs et bienveillants, ainsi que son éternelle pipe fumante à la main, car pour lui est venue l’heure d’une retraite bien méritée ; mais nous avons gagné en retour un « jeune » auteur en regain de forme qui, comme l’Edmond de son récit (le susmentionné malheureux découvreur de cadavre), aime aller à la pêche avec l’un de ses nombreux petits-fils, savourer benoîtement le temps qui passe en s’envoyant pourquoi pas une fillette de Mareuil avec la stagiaire « de notre voisin l’éditeur », et si retour en voiture il y a, en empruntant « des chemins à quatre grammes ».

La Demoiselle aux lumas, de Louis Dubost, 100 p., Éditions Geste, collection « Le geste noir », 2010, 9 €.

© Gilles Vidal

 

http://gilles-vidal.pagesperso-orange.fr

 

 

 

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